Aérospatiale

Agence spatiale canadienne

Ugo Mahue | 24 novembre 2021

Fondée en 1990, l’Agence spatiale canadienne (ASC) ou encore la Canadian Space Agency (CSA) est un organisme gouvernemental canadien responsable des activités spatiales à l’échelle nationale. Lisa Campbell occupe la fonction de présidente depuis le 3 septembre 2020 au Centre spatial John H. Chapman à Longueuil, Québec. La fondation de cette agence trouve ses origines durant la Seconde Guerre mondiale où a émergé la nécessité de créer un grand nombre de satellites et de lanceurs pour le Service des télécommunications du Conseil de recherches pour la défense (DRTE). Cette entité répond au ministre de l’Innovation, des Sciences et de l’Industrie, François-Philippe Champagne.

Le 24 novembre 2021, les membres de la mission Poly-Monde 2022 ont eu la chance d’assister à une visioconférence animée par Dr Marie-Josée Potvin, gestionnaire du programme de développement des ingénieurs et ingénieure principale des systèmes.

Les ingénieurs et membre du programme de développement étaient également présents : 

  • Anton Sura
  • Chloé Mireault-Lecourt
  • Chantelle Dubois
  • Matthew Chila
  • Andrew Hayes

Quelle est la vocation de l’Agence spatiale canadienne ?

Un des objectifs de l’Agence spatiale canadienne est d’avoir un impact sur la qualité de vie des Canadiens, ainsi l’aspect social est une composante majeure lors de l’évaluation du financement ou du lancement d’un nouveau programme spatial. Les retombées d'une technologie du domaine spatial sur la société peuvent être variées comme il est possible de le constater avec les satellites qui sont aujourd’hui indispensables à nos communications par internet et téléphone.

 

Quelles sont les conditions particulières et contraintes majeures d'une mission spatiale?

Tout d’abord, les variations de température dans l’espace peuvent être conséquentes. Elles vont de 100°C à -200°C sur la Lune et jusqu'à -170°C à +170°C en orbite autour de la Terre. Ces variations peuvent avoir lieu jusqu’à 16 fois par jour en orbite, comme c'est le cas pour la Station spatiale internationale (ISS). Il faut donc s’assurer que les composantes électroniques ont une protection thermique suffisante. Pour cela, la façon de concevoir est différente tout comme les matériaux utilisés. À titre d'exemple, il est impératif de concevoir les mécanismes avec les tolérances les plus étroites qui soient, c'est-à-dire que l'objectif est de réduire au maximum l'espace entre deux objets. C’est-à-dire l’emphase se porte sur réduire au maximum l’espace entre deux objets. Si une bulle d’air se trouve derrière une vis, celle-ci  se dilatera et fera sauter la vis lors de l’opération du satellite par exemple.

Les matériaux vont également être choisis pour éviter que ces grandes variations thermiques ne déforment trop les pièces d’un assemblage et qu’il y ait un risque de fragilisation du produit.

Une autre problématique liée au domaine spatial : le dégazage (« outgassing » en anglais). En prenant l’exemple d’une voiture neuve, les textiles des sièges vont avoir une forte odeur de produits chimiques lorsque l’habitacle est fermé. Une fois l’air changé en ouvrant les fenêtres, l'odeur se dissipe. Toutefois, lorsque les fenêtres sont à nouveau fermées pendant un certain temps, l’odeur revient. Ce phénomène s’estompe au bout de quelques semaines et porte le nom de dégazage, c’est-à-dire que les composés chimiques volatils contenus dans les fauteuils lors de leur fabrication vont prendre un certain temps à sortir du matériau. Ceci s’applique également aux matériaux polymériques avec les composés volatils qu'ils contiennent. Suite à un dégazage trop important d’une pièce, l'assemblage mécanique au complet pourrait en être affecté. Il subirait des contraintes supplémentaires susceptibles d’engendrer des défaillances allant jusqu’à sa rupture. Le dégazage peut également être nocif pour les astronautes ou encore venir se condenser sur les senseurs et ainsi fausser les prises des mesures essentielles au bon déroulement d’une mission. Les ingénieurs spatiaux lors de la conception vont donc se diriger vers des matériaux à faible dégazage.

Enfin, les radiations issues de l’activité du soleil sont également problématiques dans l'espace, les flux de protons, neutrons et d'électrons viennent endommager l’électronique et modifier la transmission de l’information même à l’intérieur des circuits. Outre l’électronique, la santé des astronautes est également un sujet problématique. Des protections en aluminium sont notamment développées afin d’éviter une trop grande exposition à ces radiations susceptibles d’engendrer des cancers (radiation ionisante).

 

Quels sont les principaux risques lors de l’opération d’un satellite ?

Les débris spatiaux représentent un risque permanent pour toutes les structures en orbite. Ils flottent généralement entre 400 km et 700 km d’altitude. Un débris peut atteindre jusqu’à 7 km/s et une taille de 10 cm. Il faut savoir qu’un débris à 400 km d’altitude prendra 25 ans avant de se désorbiter. Il orbite présentement 30 000 débris spatiaux de plus de 10 cm de diamètre et ce nombre ne cesse de croître, car ces derniers entrent également en collision entre eux. Ce phénomène se nomme le ‘’Syndrome de Kessler’’ et c’est pourquoi l’ensemble des pays se concertent de plus en plus afin d’assurer des missions spatiales sécuritaires et moins polluantes. 

L’ISS, la Station spatiale internationale, effectue régulièrement des manœuvres d’évitement afin de se prévenir d’éventuelles collisions avec des débris spatiaux. Sachant que la taille minimale de détection d’un débris est de 10 cm, il existe d’autres moyens d’éviter un dommage sur la station spatiale. Notamment, des panneaux sacrificiels sont mis en place afin de freiner les débris en utilisant des structures internes en nid-d’abeilles. La première interface du panneau va venir éclater le débris en plus petits morceaux qui vont donc perdre de l’énergie et se faire retenir par la deuxième paroi du panneau.

 

Quelles sont les missions de l’Agence spatiale canadienne ?

L’Agence spatiale canadienne collabore grandement avec les autres agences notamment avec l'Agence spatiale américaine (NASA) et l’Agence spatiale européenne (ESA) sur de nombreux projets.

Elle a notamment mené le projet RADARSAT 1, qui permettait d’effectuer des observations de la Terre utiles dans des secteurs tels que l’agriculture, l’océanographie ou encore la fonte des glaces. Dr. Potvin a d’ailleurs été cheffe de projet mécanique pendant les phases initiales de ce projet.

Gateway est un projet de station spatiale orbitale autour de la Lune. Cette station six fois plus petite que l’ISS servira de banc de tests pour des expériences scientifiques, mais également un jour de tremplin vers la planète rouge.

Un des projets lancés le 25 décembre 2021 est le projet James Webb. Ce télescope s’aventure dans une longueur d’onde échappant à l’œil humain : l’infrarouge. Ce rayonnement que tout corps qu’il soit humain ou non produit sera détecté notamment grâce à des instruments canadiens :

1) Le détecteur de guidage de précision (FGS), qui permet au télescope de cibler les objets d'intérêt et de faire la mise au point dessus.

2) L'imageur et spectrographe sans fente dans le proche infrarouge (NIRISS), instrument scientifique qui aide à étudier plusieurs types de corps célestes, par exemple des exoplanètes et des galaxies lointaines.

Cette collaboration a permis, en outre, de développer de l’expertise et de créer des emplois sur le sol canadien. De plus, les données collectées par le télescope ainsi qu’une certaine plage d’opération de ce dernier seront dédiées à la recherche des scientifiques canadiens.

 

Quels sont les moyens pour faire connaître l’ASC auprès des jeunes ?

Un projet a été lancé avec la collaboration de plusieurs universités à travers le Canada, le PeekBot Project. Il s’agit de l’élaboration d’un rover effectué en grande majorité par de l’impression 3D. L’un des avantages est de pouvoir réparer plus facilement les pièces. 

Dans la poursuite du projet Artémis, qui envisage un retour des explorations lunaires, plusieurs projets ont été lancés en collaboration avec l’Agence spatiale canadienne notamment à Polytechnique Montréal sous la supervision du Pr Gosselin du département de génie mécanique. La première itération en 2021 visait à obtenir une imprimante 3D permettant de créer un filament à base de sol lunaire, le régolithe et de l’imprimer. Celle de 2022, quant à elle, réunit 22 étudiants, dont certains de HEC Montréal, afin de réfléchir à l’élaboration d’une base lunaire. 

Propos recueillis par l’équipe de Poly-Monde lors de la visite virtuelle du 30 novembre 2021

Contribution du Canada au télescope spatial James Webb. (2021, December 25). Agence spatiale canadienne. https://www.asc-csa.gc.ca/fra/satellites/jwst/contribution.asp

La Presse. (2021, December 26). Lancement réussi pour le télescope spatial James Webb. https://www.lapresse.ca/actualites/sciences/2021-12-25/lancement-reussi-pour-le-telescope-spatial-james-webb.php

La station lunaire Gateway. (2021, August 24). Agence spatiale canadienne. https://www.asc-csa.gc.ca/fra/astronomie/exploration-lune/station-spatiale-lunaire.asp

What is RADARSAT-1. (1995, November 4). Canadian Space Agency. https://www.asc-csa.gc.ca/eng/satellites/radarsat1/what-is-radarsat1.asp